L’Île Dupas : une lutte à finir

Depuis plusieurs décennies, les rives du lac Saint-Pierre accueillent des marais endigués, aménagés pour favoriser la reproduction de la sauvagine, du poisson… et d’une foule d’autres espèces, dont le Petit Blongios, un petit héron menacé au Canada et vulnérable au Québec. Ces milieux humides sont de véritables joyaux écologiques. Mais leur équilibre est menacé.

 

L’envahissement rapide du roseau commun exotique (Phragmites australis australis), une plante invasive extrêmement agressive, a commencé à compromettre l’intégrité de ces habitats si précieux.

 

Heureusement, le Comité ZIP du lac Saint-Pierre, en collaboration avec un comité d’experts en plantes envahissantes, a pris le taureau par les cornes. Un projet d’envergure a été lancé dans la Commune de l’île Dupas pour freiner la progression du roseau et redonner souffle à ces écosystèmes fragiles.

 

Un constat alarmant en 2021

Tout a commencé en 2021, avec une première caractérisation du terrain. Le verdict : 61 colonies de roseaux envahissants identifiées dans deux marais, ainsi qu’une superficie totale de 3,7 hectares colonisée dans une zone parcourue de nombreux fossés. Le site était clairement en danger. Il fallait agir — et vite.

 

2022 : premières actions sur le terrain

Les interventions ont débuté dans la section prioritaire, celle des fossés, identifiée comme une source potentielle de contamination pour les marais du Petit Blongios. Les colonies de roseaux y ont été fauchées. L’objectif : contenir la propagation et préserver l’habitat essentiel de ce petit oiseau si discret, mais si précieux.

 

2023 : intensification des efforts

En 2023, les efforts se sont déplacés vers la digue nord-est de l’île. L’équipe a mandaté une firme externe répendre de l’herbicide de manière ciblée sur le sommet de la digue, tout en coupant les colonies sur les pentes à la débroussailleuse.

 

Avec l’utilisation d’un drone, de nouvelles colonies ont été repérées, dont une immense colonie de plus de 3900 m² au cœur du marais. Cette découverte a changé la donne : le projet a pris une ampleur plus grande que prévu, mais l’équipe a su s’adapter.

 

2024 : un tournant stratégique

Pour ajuster les interventions en fonction des nouvelles réalités du terrain :

  • Toutes les colonies répertoriées ont été débroussaillées;
  • Des colonies hors digue ont été fauchées
  • Des méthodes différenciées ont été mises en place selon la densité des colonies;
  • Les coupes ont été adaptées pour minimiser la repousse.

Été 2025 : des plantations pour l’avenir

Cette année, un plan d’aménagement détaillé a été élaboré par une firme externeDès que les conditions l’ont permis à l’été 2025, l’équipe est retournée sur le terrain pour planter massivement des espèces d’aulnes et de saules.  Ces plantations ont été réalisées à une densité élevée (1 500 unités par hectare) dans le but de réduire l’accès à la lumière pour le phragmite. Grâce à leur croissance rapide et à leur feuillage dense, ces plantes créent en quelques années une ombre importante au sol, limitant ainsi fortement, voire totalement, la lumière disponible. Cela empêche la repousse du roseau.

 

Par ailleurs, la plantation et le semis de quenouilles sont prévus afin de favoriser le développement de ce type d’habitat. Les quenouillères constituent un milieu favorable à la reproduction du Petit Blongios, ainsi que d’autres espèces d’oiseaux. Des exclos ont également été installés pour protéger les plantations contre le broutage par les mammifères. Enfin, des semences variées et adaptées aux conditions du site ont été dispersées pour restaurer les sols mis à nu. Un suivi annuel est désormais en place, effectué chaque printemps après la fonte des eaux, pour assurer la pérennité des aménagements.

 

Une réussite collective pour la biodiversité

Grâce à ce projet ambitieux, la Commune de l’île Dupas est en voie de redevenir un sanctuaire pour le Petit Blongios et bien d’autres espèces. Ce travail d’équipe — entre biologistes, experts et partenaires locaux — montre qu’il est possible d’agir contre les espèces envahissantes, avec des actions ciblées, durables et respectueuses des milieux.

 

Le Comité ZIP du lac Saint-Pierre peut être fier : ce projet est une belle réussite malgré ses nombreuses difficultés et une source d’inspiration pour les autres initiatives de restauration écologique.